Ce constant travail avec le feu des sages a finalement réussi à unir pour toujours les deux natures. Nous pouvons comprendre ceci si nous observons que la Déesse Lune se trouve auprès de l'homme agenouillé et qu'à côté de sa compagne agenouillée aussi, est située le Dieu Soleil. Ce contraste chimico-philosophique signale que les deux forces, le soufre et le mercure (l'homme et la femme), ont réussi à se cristalliser à l'intérieur du Maître qui est né.
C'est pour cela que nous voyons l'homme et la femme de cette planche se donnant la main, en signe de réconciliation.
Derrière le couple alchimiste, nous voyons, sur le sol, l'échelle Divine, que nous avons déjà vue au début de cette oeuvre. Elle ne nous montre que dix échelons, nous indiquant que le travail dans le magistère du feu s'est terminé.
Sur la couverture du Mutus Liber, l'échelle comportait douze barreaux visibles, nous invitant donc à monter par l'échelle secrète (la colonne vertébrale) qui unit la matière à l'esprit, le divin à l'humain.
Lorsque le feu a pénétré les trente-trois vertèbres des colonnes vertébrales de chaque corps intérieur de l'adepte (vital, astral, mental et causal), on dit alors que l'échelle allégorique (la colonne vertébrale) entre en repos.
Au-dessus du couple, l'ancien des jours est enlevé dans les airs; c'est le Kéther de la Kabbale qui s'est intégré avec l'adepte. Cet ancien ou monade divine et profonde reçoit une couronne de lauriers, symbole du Triomphe et de la Victoire; car il a atteint le Grand-Oeuvre dans la nature physique et spirituelle de l'adepte. Il est l'Etre de notre Etre et il reçoit toujours des galons et des félicitations lorsqu'il a réussi à se manifester (dans sa totalité) dans toutes les dimensions de l'univers.
Le Seigneur de perfection est soutenu par deux anges symbolisant le pouvoir spirituel. Ces deux anges sont ceux qui faisaient sonner les trompettes dans la première planche de ce livre sacré.
Le Seigneur de la Kabbale (vénérable ancien ou maître intérieur) tient une longue cordelière (dénouée, détachée ou défaite) ; elle constitue le nœud gordien de la philosophie médiévale. Ce nœud est constitué de l'Ego animal qui a été détruit dans l'adepte, qui est mort en lui-même.
Nous notons de même deux roses dans les mains de l'ancien, une blanche et une rouge. La rose blanche symbolise l'âme et la chasteté de l'adepte. La rose rouge est le symbole de la pierre philosophale ou Christ intime uni ou incarné en l'âme de l'initié. C'est la preuve que le maître ou adepte a atteint la perfection dans la maîtrise et qu'il s'est uni à son Christ intérieur profond. Le Christ revêtu des corps existentiels supérieurs de l'adepte (sans Ego et recouvert d'or potable transmuté) constitue le To Soma Heliakon ou Sahu égyptien, c'est-à-dire la pierre philosophale.
Il est bon de signaler que celui qui réussit à incarner son Christ intérieur acquiert les trois dons de la pierre philosophale : la santé permanente, la sagesse universelle et la richesse intérieure.
Le couple qui observe l'ancien, prononce la phrase suivante : Oculatus Abis (tu t'en vas clairvoyant), lorsque l'adepte incarne l'ancien des jours il se convertit en un clairvoyant légitime qui peut pénétrer toutes les énigmes de l'univers.
La phrase latine que nous venons de voir peut être décomposée, selon la Kabbale phonétique, de la manière suivante : Oculatus Ab Is (le clairvoyant est issu de ceux-ci), des deux éléments de base du Grand-Oeuvre, le soufre et le mercure, l'homme et la femme, etc.
De plus, nous observons que dans cette planche, toutes les figures sont comprises dans un cercle que réalise les deux grandes tiges ou rameaux d'olivier. L'olivier représente la sagesse, la paix et l'abondance. Ces deux branches symbolisent les deux canaux secrets (Ida et Pingala) qui sont maintenant christifiés par l'huile sacrée, huile d'olive ou ens seminis transmuté.
Ceci délivre à l'adepte la sagesse divine : rappelons-nous que le Christ médita profondément sur le Mont des Oliviers.
Les deux rameaux sont unis à la base par deux ailes formant un X. L'X est le symbole de la mort. De nombreuses fraternités maçonniques du siècle passé adoptèrent le symbole de la croix en X afin de symboliser la mort "du frère terrible de la maçonnerie" ou Ego animal.
Notons de plus, que les deux ailes sont les ailes ignées ou ailes de la sagesse avec lesquelles l'adepte peut remonter vers les plus hautes cimes de la connaissance divine.
Dans les cieux, nous apercevons le soleil gouvernant l'espace infini ; il est tout seul, sans la lune à ses côtés, afin que nous comprenions deux choses :
a) La destruction de toute la nature lunaire à l'intérieur de l'adepte.
b) La cristallisation totale de la force solaire dans la nature physique et spirituelle du héros ésotérique.
Le soleil est le symbole de la force primordiale de la création (le Kéther de la Kabbale). Tout émerge du feu et tout retourne au feu.
Finalement, au-dessous des ailes ignées resplendit un écusson qui symbolise la royauté à laquelle appartient l'alchimiste Jacob Sulat (Altus). Cet écusson avait en haut une inscription qui a maintenant disparu. Nous pouvons dire que les trois petites figures et les trois petits points sont une vive allusion aux trois forces primaires de la création (Père, Fils et Esprit Saint) gouvernant maintenant les cieux (de conscience) et la terre (corps physique et corps internes) sur laquelle se développe l'adepte. Voilà réalisé le Grand-Oeuvre et nous comprenons maintenant les paroles de Jésus : "Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel"...